Francesco Tristano (InFiné, Deutsche Grammophon – Lux/Bcn)

Francesco Tristano (InFiné, Deutsche Grammophon – Lux/Bcn)

Francesco Tristano a un parcours atypique dans le monde de la musique électronique.
En effet, diplômé de la Juilliard School, sa carrière débute en 2000 avec l’Orchestre national de Russie. Agoria le prend sous son aile, intègre l’écurie Infiné en 2006, et sort son 1er EP à succès «Strings of Life». Il a fait partie de l’aventure Aufgang jusqu’ en février dernier. Depuis, il multiplie les projets (Tockyo Reverse, Scandale…).

1°) Avec ta venue, le festival Kolorz prend une dimension «romantique». Tu vas y retrouver Derrick May et Agoria avec qui tu as collaborés à plusieurs reprises. [on se souvient de ta reprise du «Strings of Life»] Tu as une réelle passion pour la scène Techno de Detroit. D’où vient cette attirance ? Qu’est-ce qu’a Detroit que les autres n’ont pas ?

Le son de Detroit est l’incarnation même de la tristesse urbaine. C’est une musique hautement émotionnelle, tout comme les musiques acoustiques. Je pense que c’est là l’élément qui m’attire le plus : le fait qu’une musique générée par des machines puisse avoir une telle profondeur, une telle portée émotionnelle. Evidemment, même si elle est générée par des machines, elle est programmée par des êtres humains. Les producteurs de Detroit, surtout ceux de la première génération (dont Derrick fait partie) ont traduit en musique le triste sort de leur ville : une ville jadis rayonnante, prometteuse d’un futur meilleur grâce à l’industrie qui avait créée des emplois en masse, est tombée en ruine et s’est transformée ces dernières trente années en ville-fantôme. Il faut y aller pour comprendre l’ampleur de ce déclin. Mais l’esprit est resté, les habitants ont une culture musicale hors du commun. Il y a évidemment une scène techno très forte dans d’autres villes comme Berlin, Tokyo ou Barcelone, mais Detroit restera toujours unique. J’ai partagé l’affiche avec Derrick l’été dernier, mais cela fait un moment que je ne vois pas Sébastien (Agoria) – ce sera un plaisir de nous retrouver tous à Carpentras !

2°) On t’a vu récemment en chef d’orchestre pour «Tokyo Reverse» jouant pendant des heures à la Belleviloise ! Comment as-tu préparé cette fameuse nuit ? Et comment as-tu vécu cette expérience inédite ?

C’était une expérience totalement folle. Simon Bouisson, le réalisateur, m’avait entendu en concert aux Théâtre des Bouffes du Nord à Paris et m’a demandé d’assurer la direction musicale de cette expérience ‘Slow TV’ qui était une première en France : jouer la bande-son d’un film d’une durée de 9h en live ! J’ai invité mes amis Bachar Khalife et Pascal Schumacher (avec lesquels je joue en trio) ainsi que mes chers Brandt Brauer Frick (qui font décidément un des sons les plus futuristes du moment) à me rejoindre, et Radio Nova, qui était partenaire de la soirée, a placé Thylacine, jeune producteur français, ainsi que Limousine (un groupe que je suis depuis leur premier album) – ensemble, nous avons passé une soirée inoubliable : créer, jouer, improviser pendant une nuit entière. Il y eut des moments magiques, surtout dans les transitions. Sur les 9h de musique, j’ai dû en jouer presque 5. . . Devant leurs télévisions, les spectateurs ont suivi pas à pas Ludovic Zuilli qui déambulait dans les rues de Tokyo, et ont assisté à une expérience audiovisuelle nouvelle. Ce fut un événement comme l’attestait le trending topic n. 1 #tokyoreverse sur twitter.

3°) Tu es actuellement en tournée pour «Scandale» aux côtés d’Alice Sara Ott. La première a eu lieu mi-mai et fut un succès. Tu peux nous en dire davantage sur ce projet ?

Alice et moi nous sommes amis depuis bientôt 5 ans. Il était évident que tôt ou tard, nous ferions de la musique ensemble. Le contenu du projet ‘Scandale’ s’est défini au cours d’une année : en ligne de mire, nous avons placé la figure de l’imprésario Sergei Diaghilev des Ballets Russes à Paris, au début du 20e siècle. Toutes les œuvres qu’il commandait aux compositeurs tels Ravel, Stravinski étaient scandaleuses: le public, ainsi que les critiques, étaient en choc. Nos premières dates en Allemagne ont été bien accueillies, nous continuons sur une dizaine de dates au Japon, en Corée ainsi qu’en Australie avant de reprendre la tournée en Europe. J’ai aussi composé une nouvelle oeuvre pour le projet (‘A soft shell groove’),sorti à la rentrée en 12’’ avec des remix. . .

4°) Aurais-tu une summer hit-list à nous conseiller ?

Je ne suis pas très calé sur les dernières sorties hélas, manque de temps. Mais je suis de près les prochaines publications sur Cadenza, Visionquest, InFiné et Get Physical !

5°) Barcelone est toute proche ! On aimerait connaitre tes bons plans (en tant que noctambule, amateur de bons petits plats et de café)

ton festival (Sonar sans doute ?) : Bien sûr, un des meilleurs festivals au monde
ton club : The Loft
ton disquaire : Discos Paraiso
ton resto : Shunka, pour ceux qui aiment le sushi. Ou alors l’AnticaPiada, véritable piadineria à Barceloneta, pour
le petit creux.
ton bar : Tomas, pour les meilleures patatas bravas de la ville
ton café: La Valenciana, pour prendre un véritable verre d’Horchata