Laurent Garnier (F-com – FR)

Laurent Garnier (F-com – FR)

« A dix ans, ma chambre était organisée comme une discothèque. Stroboscope, lumières d’ambiance, spots multicolores, boule à facettes, console de DJ, piste de danse. Lorsque j’allumais mes machines, des centaines d’étoiles blanches tournoyaient en un ballet cosmique sur les murs de ma chambre. La boule à facettes tournait chaque soir. Je n’avais qu’une envie : faire danser les gens. » Laurent Garnier « Electrochoc ».

Il sera présent au worldwide festival à Sète, dimanche 12 Juillet et à Kolorz festival à Carpentras, le 17 Juillet 2015

1°) Début juin, était lancée la période des festivals estivaux avec weather à Paris et Yeah à Lourmarin. L’un dans l’esprit « parisien – rave », l’autre dans le style « local – famille et convivialité ». Tu es à l’origine du Yeah, pourquoi avoir choisi ce format ? et surtout pourquoi ne pas avoir laissé une place plus grande à la musique électronique ?
Parce que, connaissant le lieu où l’on avait la chance de pouvoir programmer le festival, c’est-à-dire un château du XVème siècle, qui a une cour ouverte sur tout le village, et, d’autre part, m’associant avec deux personnes qui venaient plus du créneau pop rock, qu’électronique, il a fallu savoir comment faire les choses pour qu’elles s’adaptent aux endroits et aux horaires aussi. Nous, on n’a pas le droit de finir après 1 heure du matin ; nous avons estimé que la musique électronique n’avait pas vraiment sa place dans un évènement qui finit aussi tôt. Et puis, j’avais envie, avec mes deux associés, de créer une alternative à ce que je vois un peu toute l’année, pour aussi m’amuser. Si c’est juste pour faire les mêmes choses, je ne vois pas vraiment l’intérêt. Il y a pas mal d’évènements de musique électronique dans le sud de la France et par contre, de petits festivals où on privilégie autre chose que la musique, c’est-à-dire, bien manger, boire de bonnes bouteilles de vin, des ateliers pour les enfants, c’est ce dont on avait envie avec mes deux associés ; faire un truc qui nous ressemble en fait.
2°) Cette année, de nombreux festivals sont annulés. Tu as connu l’annulation de OZ en 1993. 20 ans après, penses tu que les pouvoirs publics ont toujours peur de ce mouvement ?
Déjà, les festivals n’ont pas été annulés à cause des politiques ; les festivals sont annulés car il y a énormément de problèmes de subventions. Ça n’a rien à voir. Nous, OZ a été annulé parce qu’il y a eu beaucoup de choses racontées dans la presse : c’était la chasse aux sorcières par rapport au phénomène « rave » et ca faisait extrêmement peur, à l’époque. Je ne pense pas du tout que le Weather ou d’autres festivals « electro » souffrent de pression comme on a pu en avoir, à l’époque. Il faut se rendre compte que toute la presse était contre nous, et c’est pour ça qu’OZ a été annulé. D’ailleurs, OZ n’avait aucune subvention. Non, vraiment, tous les festivals qui n’ont pas pu se tenir cette année, c’est essentiellement un problème de subventions.
Enfin, il y a eu quand même le « WorldTrance Festival », la rave de Corneilhan, dernièrement.
Je n’ai pas été au courant. Bien sûr, il doit bien y avoir des festivals annulés à cause des politiques qui n’en veulent pas ; mais je pense qu’aujourd’hui, on souffre beaucoup de moins de ces annulations ; ce n’était pas 1 festival sur 2, à l’époque, qui était annulé, mais plutôt 2 sur 3. C’est vrai qu’il y a eu aussi « I love Techno » à Montpellier, cet hiver ; après, est ce que c’était une peur de cette musique là, ou des problèmes plus complexes comme des guerres internes entre les différents protagonistes ?

3°) Comment expliques tu qu’en France, il n’existe toujours pas de gros festivals de musique électronique comme il en existe dans le reste de l’Europe ?
Quand même, il n’y a pas de festivals type les « nuits sonores » dans beaucoup de pays !
En Espagne, il y a un gros festival, le « sonar ». Mais après, quand on a un festival, comme « les nuits sonores », qui, pour moi, même si ce sont des amis, en tant que festivalier et en tant qu’artiste, est un des meilleurs festivals au monde, il faut le dire. Il n’y a pas 10 festivals comme ça dans le monde. On devrait être assez fier de ce qu’on a car on a de très beaux endroits et de beaux festivals où l’on peut écouter de la bonne musique.

4°) On pourra te voir le week end prochain au sonar, et cet été au worldwide Festival et enfin à Kolorz. Sais tu d’avance ce que tu vas jouer ou fais tu ça au feeling ?
Je ne sais jamais ce que je vais jouer, absolument pas. Même 5 minutes avant de jouer, je n’en ai aucune idée.
Pour moi, que ce soit devant 50 personnes ou 3000, c’est exactement la même chose ; il faut savoir s’adapter à l’heure, au public, au son, à l’ambiance, à ce que je ressens, mon état… C’est toujours un truc d’improvisation. Après, j’aime bien terminer avec des disques précis, des morceaux plus festifs, des clins d’œil, mais à l’intérieur de mon set, c’est très rare que je me répète et que je programme.
Quand même, au « sonar », où tu es un peu comme « à la maison », tu clôtures le festival, tu n’as pas une petite idée de ce que tu va faire ?
Non, aucune, et les rares fois où je me suis dit, je vais jouer ce truc là, je ne le joue pas, finalement. Je pars toujours sur autre chose. Il faut vraiment savoir choper le moment et raconter une histoire à l’instant T. Souvent, je ne sais même pas qui joue avant moi ; donc, le soir même, j’aime bien regarder ce qui se passe une demi heure avant, afin de me plonger dans l’ambiance.

5°) Tu es en train de réaliser au cinéma « electrochoc ».
Non, pas encore. J’aimerai bien pouvoir le faire, ça fait 7 ans que je travaille dessus. J’espère que ça va se faire, maintenant. Mais on est encore en train de chercher le distributeur et le financement. C’est compliqué, on n’est pas du tout sur les mêmes chiffres que dans le disque. Par contre, je voudrai que ce soit super clair ; je le redis encore, même je l’ai dit 1000 fois : Ce n’est pas le film d’« électrochoc ». C’est une vraie fiction, il n’y a pas de Laurent Garnier dans le film, pas de Rex club, Carl Cox n’existe pas. C’est une fiction sur un personnage que l’on va suivre de l’âge de 12-13 ans jusqu’à 30 ans, qui, à un moment, va devenir dj.
6°) As tu vu « Eden  » ? qu’en as tu pensé ? est ce que ce film t’a donné des pistes pour la réalisation de ton film ?
Oui j’ai vu Eden. J’étais comme tout le monde, après avoir entendu ce qu’ils ont essayé de vendre dans la presse, essayer de dire que c’était un film sur l’arrivée de la French Touch en France. C’est, en fait, un film sur 3 personnes qui organisent une soirée assez emblématique à Paris et sur l’ascension et la descente d’un des personnages qui était aussi dj de ces soirées là. Déjà à la base, ils n’ont pas vendu le film correctement ; Moi, j’ai vu un film sur la nuit parisienne ; ce n’est pas Le grand film sur la musique électronique. Mais je suis mal placé pour juger quoique ce soit ; je ne suis pas en position de pouvoir juger le cinéma de quelqu’un d’autre qui a fait de très bons films. Je reste très humble par rapport à ça. Voilà je l’ai vu, j’ai bien aimé les scènes de club ; après j’ai été déçu par ce fait qu’on m’ait vendu quelque chose que je n’ai pas retrouvé.

7°) Ta « Home Box » limited édition, sortie le 16 avril avec FCom à 1 000 exemplaires étant sold out, prévois-tu une nouvelle édition ?
Non, on a promis qu’on en faisait 1000, on en fait 1000. Nous tenons nos promesses.

8°) Habitant à Lourmarin dans notre Lubéron, si tu rentres chez toi et que tu entends les basses d’une free partie (nombreuses autour de chez toi), aurais tu envie d’y passer ? pourquoi ?
Ça dépend des soirs. Si je dois me lever le lendemain pour amener mon fils à l’école, non. Mais si c’est samedi soir et que je suis d’humeur à sortir, oui, bien sûr. Je sais très bien qu’il y en a, dans le coin.

8°) As tu lu le livre « electro 100 – les albums essentiels des musiques électroniques » ? es tu d’accord avec lui ou aurais tu fait un autre choix ?
Non, je l’ai et je n’ai pas encore lu. Il est sorti sur « Le mot et le reste » que je connais très bien car ils sont de Marseille et viennent sur le festival yeah pour vendre leurs livres. Ils m’ont donné un exemplaire, je ne l’ai pas encore regardé mais, ok, je vais le lire.