D’Jamency (Amazone Records)

D’Jamency (Amazone Records)

DJ, Producteur et manager du Label d’Amazone Records, D’Jamency est un artiste aux multiples talents… Lyonnais d’origine, il se produit maintenant sur toute la scène minimaliste internationale, entretien avec un Dj pionner du mouvement.Tu es issu de la scène rave des années 90, es-tu nostalgique de cette époque ?

Quand j’ai découvert le milieu rave, ce fut une vraie révélation pour moi: c’était tout beau, tout neuf, réservé aux passionnés ! Comme toute naissance d’un nouveau courant musical 😉 Je suis vraiment heureux d’avoir pu découvrir cette nouvelle scène à ses débuts en France : ces soirées amenaient un son nouveau, un public motivé (toujours partant à faire des bornes pour faire une soirée) et intimiste (car on finissait par tous se connaître), des lieux magiques (caveaux, châteaux, entrepôts, salles en tout genre…), des décos délirantes et des artistes qui développaient positivement le métier de dj…

bref une vrai culture technoïde se mettait doucement en place ! Pour moi, c’est une période qui restera gravée dans ma mémoire mais, malgré tout, je ne fais pas parti des personnes nostalgiques : cette scène a évolué musicalement au fur et à mesure des années, elle s’est démocratisée et professionnalisée, l’effet de mode du dj s’est installé avec des cotés positifs et négatifs… mais c’est bien normal, la vie change, évolue… je veux vivre avec mon temps, et ne pas devenir aigri de cette période d’or 😉

En 1994, tu crée l’association Orbital Space, peux-tu nous raconter brièvement son histoire ?

J’ai tout d’abord acheté mes 1eres platine aux débuts des années 90 afin de travailler les subtilités du mix tout en continuant à partager ma passion musicale avec les gens durant les soirées. Ensuite, j’ai commencé à jouer en public dans des petits lieux. Mais j’étais également attiré par l’organisation de soirée… je voulais aussi faire quelque chose de constructif pour le développement de la scène électronique. J’ai donc décidé de fonder l’association Orbital Space qui avait pour but la promotion de ce mouvement. En plus de 15 ans, mon associé Mekanic’s et moi même avons organisé ou co-organisé de nombreuses soirées en Rhône-Alpes mais aussi dans d’autres régions comme par exemple le Sud de la France pour les « Digital Forest 1 & 2 ». Aujourd’hui, étant intermittent du spectacle depuis 9 ans, je n’ai plus beaucoup le temps d’organiser de gros évents mais nous continuons toujours à faire quelques résidences dans différents lieux sur Lyon notamment. Et nous restons toujours ouverts à de futures collaborations avec d’autres acteurs de la scène pour proposer des évènements électroniques de qualité.

Avant d’être DJ, allais-tu sur les Dancefloors, comment as-tu découvert cet univers ?

Bien sûr, j’ai commencé par user mes baskets sur les dancefloors des raves au début des années 90 avant de devenir Dj (rires !). C’est un ami dj qui m’a fait découvrir l’univers de la scène électronique en m’emmenant à ma première « rave party » comme on les nommait à l’époque 😉 Ca été une vraie découverte musicale pour moi. C’est à partir de cette période que j’ai commencé à développer ma culture musicale electro en allant écouter de nombreux artistes en soirées. Et je me souviens avoir regardé pendant des heures les djs durant leurs prestations afin de mieux comprendre et d’assimiler les techniques de mix. Ensuite j’ai tout naturellement commencé par acheter mes premières platines afin de travailler les subtilités du mix. Je me suis entraîné régulièrement avec quelques potes qui étaient plutôt issu du hip hop… Puis quand je me suis senti prêt, j’ai commencé à mixer dans de petites soirées dans ma région. Et ce fut le début d’un long parcours musical pourr moi…

Tu es co-fondateur du label Amazone Rec, est-ce que monter son label est vraiment difficile ? Quel conseil peux-tu nous donner ?

En 2005, j’ai fondé avec Marco Asoleda le label techno français Amazone records. A cette époque nous avons commencé par sortir des vinyles. Il a donc fallu trouver de bons distributeurs ce qui n’était pas évident au départ. Au fur et à mesure, nous avons pu travailler avec différents distributeurs français et étrangers (Cyber Prod –FR-, Still Music –DE-, Pro Active –UK-). Puis avec la crise actuelle du vinyle, nous nous sommes également installés sur différentes plateformes de ventes de musique digitale (Beatport, Juno, iTunes, Track it Down…). Cela nous permet de faire plus de sorties pour un budget beaucoup moins onéreux que le vinyle. Notre politique maintenant est de proposer de nombreuses productions d’artistes reconnus et de nouveaux talents au format MP3 et WAV et de sortir des formats vinyle ponctuellement. Tout ce que je peux vous conseiller, c’est qu’il faut être motivé, passionné et ne pas rechercher le gain financier dès le début lorsqu’on monte un label. Il est plus simple de monter tout d’abord son label digital puis de tenter des sorties vinyles ensuite. Le secteur du vinyle est de plus en plus difficile avec l’arrivée en masse des productions digitales… Même si il est beaucoup plus simple de monter son label digital, il faut vraiment bien travailler la production, la promotion, la communication et le marketing de ses sorties pour être le plus visible possible, étant donné le nombre de sorties qu’il y a par semaine sur Beatport par exemple… le secteur digital finit par être de plus en plus saturé mais le coté positif est qu’il est riche et accessible à tous !

Au fil des années, tu te crée une réputation mondiale en jouant de plus en plus à l’étranger, au coté des plus grand (Carl Cox, Ellen Allien, Oxia), comment compares-tu le public Lyonnais avec le public international ? Et français ?

J’essaie de ne pas trop les comparer, chaque pays est différent, chaque public par rapport aux soirées également. Le mouvement électronique français se porte assez bien, malgré la conjoncture actuelle. On a de nombreux festivals de qualité et aussi plusieurs clubs qui proposent de très bon line up. Juste un petit bémol sur les évents dans des lieux un peu inédit (hors club) qui se font plus rares ce qui est un peu dommage car soirées ont vraiment un charme et une ambiance particulière… J’aime bien jouer un peu partout en France, le public est assez différent entre chaque région mais c’est ce qui fait son attirance je trouve. Il est vrai que la France est encore un peu à la traîne par rapport à certains pays comme l’Allemagne, la Belgique, la Hollande, l’Angleterre, la Suisse ou même plus récemment l’Espagne où le mouvement fait vraiment parti intégrante de la culture musicale avec le développement de nombreux clubs, festivals ou soirées qui valorisent la scène électronique. Quand tu joues en Allemagne par exemple, on voit bien qu’il y a pour l’instant un potentiel plus important qu’en France et que les gens ont souvent une culture électro plus développée. L’une des dernières grosses claques que j’ai prise est lorsque j’effectue mes dj tour en Asie, le public est vraiment génial là-bas : un vrai dancefloor d’amateurs de sons electro, accueillants et festifs, bref énorme !! Mais bon, c’est un peu normal, venant de France, j’étais tellement dépaysé par leur culture totalement différente de la nôtre 😉 Au niveau du milieu lyonnais, malgré des difficultés dans les années 90, nous avons maintenant un festival Nuits Sonores qui fait rayonner la scène électronique dans notre région. Il y aussi quelques structures et associations qui organisent des events intéressants ainsi quelques clubs qui programment des artistes de qualité régulièrement… Au niveau structure, je peux citer les soirées organisé par Elektro System, l’une des structures les plus actives sur Lyon.

Quel est ton pire souvenir de mix ?

Je t’avoue que j’essaie d’effacer ça de ma mémoire 😉 Le pire reste quand tu te retrouves dans une belle soirée où le public est au Rdv et où le matos pour mixer est de mauvaise qualité. C’est très frustrant de ne pas pouvoir être a 100% de tes capacités techniques pour donner le maximum au dancefloor. Même si un dj doit arriver à s’adapter le plus possible aux conditions, on a ce sentiment d’inachevé qui a un goût amer…

Dans ta bio, tu écris que tu as une technique de mix irréprochable, c’est quoi pour toi une technique de mix irréprochable ?

Franchement, étant un peu fainéant dans ce domaine (rires !!), je n’écris pas mes bios, je laisse le soin à mon équipe autour de moi de le faire pour moi qui sont plus doués que moi dans ce domaine et surtout qui ont plus de recul sur mon parcours musical. Il est souvent ressorti du public une opinion qui est : « il fait des mix propres et appliqués ». Je suis avant tout un dj et c’est vrai que je suis assez pointilleux dans ce domaine, j’essaie vraiment d’avoir une technique de mix la plus propre et créatrice possible. J’adore également agrémenter mes sets, avec les nouvelles générations de tables de mixage, de nombreux effets en tout genre ainsi que des samples & loops que j’aime utiliser avec un laptop et Tracktor Scratch… J’ai commencé mon apprentissage du mix avec des personnes issues du hip hop, qui sont de vrais bêtes de travail sur les platines… cela a dû me laisser une certaine exigence je suppose… Mon objectif principal reste le public, je me mets à la place des gens qui sont sur le dancefloor, c’est très agréable de se laisser porter par une musique sans que son oreille nous fasse sortir de notre rêve, ne sommes nous pas des raveurs ?

Quel est ton astuce pour apprivoiser un dancefloor ?

Chacun à sa recette je pense 😉 Moi, en premier lieu je m’efforce de faire un mix techniquement propre et efficace. Ensuite, vient la programmation artistique de ton set qui est aussi une chose primordiale : faire une bonne évolution musicale durant ta prestation par rapport à l’attente du public face à toi reste très important. C’est pour cela que je viens toujours avec une grosse quantité de tracks en soirée… histoire d’avoir plusieurs styles de musique dans mes bacs…. De cette manière, je ne suis jamais pris de court… Il faut être à l’écoute du dancefloor, pouvoir passer de l’electrohouse à l’electrotek, de la tek minimale à de la techno… De toute façon, il y a du bon son dans tous les styles et l’objectif d’un dj reste de faire danser le public pour qu’il passe une bonne soirée. Le but du jeu étant d’attirer le public au fur et a mesure de ton set vers ton son de prédilection 😉 Après, il y a aussi l’expérience qui rentre en compte, ça peut servir pour mieux ressentir ce que veulent les gens pour qu’ils s’éclatent… bref le feeling que l’on développe tout au long de son parcours de dj…

Y-a-t-il pour toi un lieu ou un évènement ou mixer en serait l’apothéose ?

Il y a tant de lieux et évents où je n’ai pas pu encore participer… Je ne suis pas pressé, je préfère continuer à travailler sérieusement et les opportunités suivront naturellement ;-)) quand même le Womb à Tokyo ou bien encore le Cocoon club à Frankfort, ça serait kiffant !!

A ton avis, est-ce que un vrai Dj peut être un Dj MP3 ?

Tout dépend de la qualité du dj 😉 Pour répondre à ta question je dirais oui. Perso, il m’arrive, assez régulièrement, de jouer avec des logiciels tels que Traktor Scratch Pro. On peut donc mixer avec des platines vinyles des MP3 grâce à ces nouvelles technologies en utilisant les loops, les nombreux effets intégrés et la possibilité de mixer 4 tracks différents en même temps. Cela s’apparente plus un mélange de mix et de live à la fois que je trouve très créateur… Et puis c’est très pratique quand on part jouer à l’étranger, car ce système permet d’emmener une sélection musicale large et variée sans être obligé de se traîner 3 bacs à disques… Après on peut aussi jouer du MP3 via des lecteurs CD très performants maintenant mais mon choix reste dirigé vers le système logiciel qui permet de continuer à manipuler des platines vinyles : et oui, je suis issu de la vieille école (rires !!)

Peux tu nous parler de tes projets à venir en matière de production ?

En 2009, j’ai déjà sorti plusieurs titres ou remixes sur différents labels tels que Communiqué rec (USA), Amazone rec, Power Underground rec ou bien encore le maxi « Blablakaux EP » qui est sorti cet été sur le label Division Virtuel. Pour cette fin d’année, je prépare plusieurs sorties sur différents labels français et étrangers notamment des remixes sur Neverending rec, des tracks sur Amazone et Division Virtuel, un 4 titres sur Communiqué rec, et bien d’autres projets dont je ne peux pas encore parler… Vous pourrez retrouver toutes les infos supplémentaires au fur et à mesure sur mon website www.djamency.com ou sur ma page www.myspace.com/djamency

Quelles machines utilises-tu pour la prod ?

Un iMac et un Macbook pro avec le soft Digital Performer avec 1 carte son Motu , quelques machines externes comme le Nova 2, Audity 2000 ou Nord Rack 2 et essentiellement des plugs Native Instruments, Reaktor, Battery et bien d’autres…. + une paire de Mackie HR824 pour l’écoute.

Avec quels labels aimerais tu travailler?

Vaste question ! Il y a de nombreux labels sur lesquels j’aimerai signer… mais je préfère prendre mon temps. Je suis avant tout un dj, je me suis donc mis à la production assez tardivement… Je ne veux pas brûler les étapes, je pense donc encore avoir besoin de produire des titres pour aiguiser l’intérêt de gros labels. Je suis déjà heureux que des labels français et étrangers me contactent maintenant régulièrement pour des tracks ou des remixes… Mais j’avoue que de signer sur les labels mythiques tels que DrumCode (pr la techno) ou Cocoon (pr la tek minimale) par exemple serait un fierté pour moi 😉

Tu te sens mieux dans la peau d’un DJ ou d’un compositeur ?

Ce sont deux activités différentes mais à la fois complémentaires. Je suis issu du milieu rave du début des années 90, je pense avant tout être un dj. Le mix c’est ce qui m’a fait vibrer dès le départ et ça continue à être le cas pour moi, on est en direct avec le public durant le tps d’un set en France ou à l’étranger. On peut faire passer beaucoup d’émotions avec le dancefloor même si un dj reste beaucoup moins visuel qu’un groupe sur scène. Mais au fur et à mesure des années, j’ai éprouvé le besoin de composer des tracks et j’ai fini par investir dans un home-studio. Je me suis mis à la composition assez tardivement même si j’ai fait une formation assez classique en clavier quand j’étais adolescent. Pour moi, la composition est une activité plus studieuse, plus réfléchie. Ce n’est pas comme un mix qui reste éphémère et unique où l’on essaie de procurer du bonheur au public en racontant une histoire musicale le tps d’une soirée. C’est très agréable de produire des morceaux dans différents styles de musique en solo ou à plusieurs… je trouve ça très enrichissant, et cela m’a permis de développer ma culture musicale. Ce qui m’a d’ailleurs servi pour élargir mes programmations musicales durant mes prestations mix.

Vidéo de djamency :

 

Aujourd’hui tu es Dj, producteur, remixeur, co-fondateur d’Amazone Rec, c’est quoi le plus difficile ? Qu’est ce qui te prend le plus de temps ?

Honnêtement le DJing est ma principale source de revenu étant intermittent du spectacle. Je suis donc déjà bien occupé les week-ends avec mes dates. Je dois également gérer pas mal d’administratifs durant la semaine concernant mon statut d’intermittent. Maintenant pour le booking et les P.R. , j’ai mon équipe qui gère beaucoup de choses pour moi. Je passe un peu de temps pour répondre aux interviews de certains medias et pour envoyer des mix à certaines radios qui me font des demandes… Sinon je passe maintenant le reste de la semaine à travailler dans mon home-studio sur des tracks et remixes pour différentes commandes de labels et aussi sur la gestion du label Amazone avec Marco. Je travaille également régulièrement avec le boss du label Division Virtuel (Atix), basé à Lyon, car je crois beaucoup en ses projets.

Il peut toujours y avoir des difficultés mais franchement je vis professionnellement de ma passion depuis de nombreuses années et je sais que c’est un véritable privilège dans notre société… donc je trouve que ça serait mal venu de se plaindre de quoi que ce soit !!

Internet est-il un « + » pour ta carrière artistique?

Je pense que l’internet est devenu un outil de communication de plus en plus efficaces et importants pour un artiste pro ou amateur d’ailleurs. Cela permet de toucher le plus grand nombre simplement et rapidement, les frontières n’existant plus sur le net. Mon website est ma vitrine internationale pour tous les gens qui veulent avoir des infos sur moi. J’en profite d’ailleurs pour inviter les personnes intéressées à venir surfer sur mon nouveau site qui vient d’être mis en ligne. Mais il est aussi intéressant d’être présent sur les sites communautaires tels que Myspace, Facebook ou bien encore Twitter. C’est quelques fois un peu fastidieux de tout gérer mais cela permet d’être en contact direct avec le maximum de professionnels de la musique (artistes, clubs, organisateurs, médias…) mais également avec le public notamment les amateurs de sons !! De plus en plus de bookings se font par l’intermédiaire de ces réseaux. Je pense que ces nouveaux moyens de communication vont encore se développer durant ces prochaines années. Quand je repense à l’époque où j’enregistrais mes mix sur des cassettes audio pour les envoyer avec ma bio papier aux clubs et organisateurs (rires !!), tout ceci a bien évolué depuis !! Aujourd’hui, en 2 clics on peut tout connaître de mon parcours artistique, de mon actualité musicale et écouter mes productions, mes mix.

D’Jamency est un nom original, y a t il une raison ou une histoire pour ce nom ?

Sous peine de vous décevoir, pas vraiment. Le but primordial étant de trouver un nom de scène dont je sois le seul à utiliser et qui soit assez reconnaissable… Chose qui a été faite avec quelques amis après une soirée bien arrosée, j’ai un peu honte (rires !!)

Au fait, quelles sont les personnes qui s’occupent de ton booking ?

J’ai une agence de booking basée en Suisse « Eject Management » qui gère la plupart des bookings internationaux. Et depuis peu, un agent Marlène. K qui s’occupe de moi pour le territoire français. Vous pouvez retrouver tous ces contacts sur mon website www.djamency.com. Cela me permet de me donner plus de temps de libre pour travailler quotidiennement dans mon home-studio pour produire les tracks et remixes que différents labels me proposent régulièrement tout au long de l’année…

Le mot de la fin ?

Merci @ tous ceux qui font vivre et bouger le milieu electro depuis tant d’années (organisateurs, clubs, medias, labels, artistes, promoteurs, bookeurs, public…) !! Sans eux je ne serai pas là 😉 Merci à Karine de Teckyo !